L’interview "Prenez-en de la graine !" de Biofruisec
Par Sarah Le mercredi 25 août 2021
On se dit tout ! Qui êtes-vous ? D’où venez-vous ? Que faites-vous ?
Moi c’est Vivien, je suis le fils du fondateur de Biofruisec, Jean-Marie, qui a démarré l’activité il y a une quarantaine d’années, en 1981. Il cherchait une manière d’améliorer la santé via l’alimentation alors il a eu l’envie de créer une offre de produits de qualité et sains. Au départ, il faisait de la vente au détail sur les marchés, puis petit à petit, il a commencé à nouer des liens avec les producteurs et il s’est lancé, il a monté des filières de production pour proposer des produits en direct des producteurs. Dans les années 90, il a commencé à travailler avec des magasins bio puis il s’est spécialisé dans l’importation et la distribution de produits secs dans les années 2000. Moi, je suis arrivé dans la société en 2014, j’ai repris les rênes pour laisser un peu de temps libre à mon père. J’ai toujours eu un pied dans l’entreprise, c’est vraiment une petite société familiale. Quand mon père a commencé à évoquer la retraite, j’ai trouvé ça dommage que tout ce qu’il avait fait pour sélectionner ces produits de qualité et les diffuser sur le marché français et européen ne soit pas pérennisé. Cette recherche de qualité elle n’est pas encore généralisée sur le marché, on a plutôt tendance à niveler vers le bas, chercher toujours le prix le moins cher.
Mon père a démarré en Dordogne mais aujourd’hui on est dans l’Oise pour être plus proches de la région parisienne. En ce moment, on est à cheval entre deux entrepôts, on a besoin de plus d’espace pour réunir nos deux adresses. On est trois employés et le gérant, mon père, qui travaille un petit peu. Quand on aura trouvé notre nouvel entrepôt, on pourra embaucher et développer rapidement l’activité.
"Pour les produits secs, ce n’est pas cohérent de faire du séchage en France sur des produits frais importés, l’impact carbone serait mauvais. "
Où et comment sont fabriqués vos produits ?
On fait le maximum de choses dans les pays d’origine, ce qui nous permet d’être dimensionnés de cette manière en France. Pour les produits secs, ce n’est pas cohérent de faire du séchage en France sur des produits frais importés, l’impact carbone serait mauvais. On élabore le produit ici en France, son emballage, on pense à sa commercialisation etc. Ensuite, on travaille en lien direct avec le producteur pour fixer le cahier des charges, les critères de qualité de nos produits. Tout est fait sur place, nous on reçoit le produit fini et on le distribue en France et en Europe. La marque Biofruisec est distribuée principalement en France et un peu dans des pays limitrophes tandis qu’à l’étranger on va plutôt fournir des produits en gros conditionnement à des entreprises.
On n’a pas une gamme très large, on a une filière au Cameroun d’où provient la banane Gros Michel, la papaye et la mangue et une autre au Togo d’où provient l’ananas et bientôt les noix de cajou. On lance des nouveaux produits seulement si on trouve un produit qui sort du lot gustativement parlant et qui est de bonne qualité. On sélectionne avant tout une variété, la meilleure que l’on puisse trouver pour un produit, puis le meilleur terroir, celui où elle va pouvoir exprimer au mieux ses qualités. Ensuite, on va regarder quelle est la meilleure méthode de transformation du produit, là où il y a il le meilleur savoir-faire pour le séchage. On va préférer du commerce équitable quand c’est possible, toujours du bio de qualité et engagé. Quand les conditions sont réunies on lance la production et la commercialisation.
Le commerce équitable, on le fait plutôt avec les pays du Sud. Dans les pays d’Europe, on ne le fait pas encore. Ça existe mais ce n’est pas vraiment approprié, cela prend plus de sens sur des produits qui fonctionnent sur un cours mondial avec beaucoup de concurrence comme le lait ou les céréales. Nous en Europe, on travaille seulement des fruits rouges ou des noix donc on n’est pas confrontés à ces problèmes.
Pourquoi avoir choisi le bio ?
C’était une évidence. Alors après il existe du bio qui ne correspond pas à nos valeurs et aussi des produits non bio qui sont très qualitatifs mais, quand on cherche la meilleure qualité de fruits secs, produits dans le respect de la Nature et de l’Homme, on se dirige inévitablement vers un produit bio à mon sens. C’est le plus simple des gages de qualité.
"Plus on consomme bio mieux se portera l'environnement qui a souffert d’une agriculture intensive dont on essuie les conséquences aujourd’hui."
Pourquoi devrait-on tous consommer bio ?
Pour la portée environnementale de l’acte. Après il y a bio et bio, le label n’est pas la panacée. Il faut aussi lire le reste de l’étiquette, s’intéresser à ce qu’il y a dans et autour du produit. Plus on consomme bio mieux se portera l'environnement qui a souffert d’une agriculture intensive dont on essuie les conséquences aujourd’hui.
Ok pour le bio, mais si on changeait du tout au tout : vous faites quoi pour limiter votre impact carbone ?
On prône au maximum le vrac. Depuis nos débuts sur les marchés et aujourd’hui cela représente encore 80% de nos activités.
Nos importations se font via les transports les moins polluants, le bateau principalement. Toutes nos filières sont organisées ainsi pour limiter l’empreinte carbone. Pour 1kg de fruits secs, on utilise plusieurs kilos de fruits frais donc on ne va pas sécher en France mais dans le pays d'origine. On va organiser et regrouper la collecte des fruits frais de telle manière que les ateliers de séchage vont être situés à proximité des lieux de culture.
En France, notre entrepôt n’est pas surdimensionné, on a des bâtiments bien isolés pour limiter la consommation d’énergie et on conserve nos produits à température ambiante grâce à cette bonne isolation. On réutilise les cartons pour des petites expéditions, on ne génère quasiment pas de déchets non recyclables.
Pour l’instant, nos produits sont emballés dans du plastique car on a une qualité de produit très haute et on n’a pas envie que le produit se détériore dans le magasin ou chez nos clients. On est obligés d’avoir un emballage barrière. Jusqu’à maintenant on utilise du plastique recyclable mais ça reste du plastique. Il commence à y avoir des nouvelles solutions sur le marché de l’emballage, comme du kraft avec juste une petite couche barrière qui n’empêche pas la recyclabilité. On va très certainement se tourner là dessus très prochainement.
"On est fiers d’avoir ce niveau d’exigence sur tous nos produits. Sur le marché, on nivelle les prix par le bas mais à ce jeu il n’y a que des perdants, les producteurs ne gagnent pas leur vie, les distributeurs ne vendent pas correctement et les gens n’achètent pas car ce n’est pas bon."
Qu’est ce qui vous rend fier ?
Ce qui me rend fier c’est d’avoir été à contre-courant. Quand tout le monde cherchait le prix, nous cherchions la qualité. Je suis fier que l’on ait redonné ses lettres de noblesse à certains produits secs. Les fruits secs n’étaient pas un produit très apprécié, pas très gourmand, pas très populaire car on était habitués aux fruits secs des grandes surfaces. La mangue sauvage du Cameroun, on est les seuls à proposer un fruit d’une si grande qualité. On est fiers d’avoir ce niveau d’exigence sur tous nos produits. Sur le marché, on nivelle les prix par le bas mais à ce jeu il n’y a que des perdants, les producteurs ne gagnent pas leur vie, les distributeurs ne vendent pas correctement et les gens n’achètent pas car ce n’est pas bon. Les produits sont à la fois pauvres nutritionnellement et gustativement.
C’est quoi votre combat ?
Revaloriser les produits secs avec une vision plus qualitative et diffuser notre goût pour des produits de qualité au plus grand nombre. Merci d’ailleurs à La Fourche pour votre démarche, vous démocratisez le bio sans rogner sur la qualité.
À quoi rêvez-vous pour l’avenir ?
On aimerait continuer sur cette lancée et élargir notre gamme avec cette même vision sur la qualité. On est contents de voir que ça se développe grâce aussi à des acteurs comme La Fourche. Il y a de la place pour une nouvelle économie vertueuse avec des alternatives de qualité et durable. Au delà de l’alimentaire, cela pourrait s’étendre à d’autres pans de l’économie. Beaucoup de gens aspirent à cela, ils cherchent des alternatives, plus de naturalité, un certain retour aux sources. Après, c’est à double tranchant, le marché global du bio ne fait que se développer mais il ne faut pas que cela aille à l’encontre de la qualité originelle du bio. Beaucoup d’acheteurs de grandes enseignes recherchent avant tout des prix bas ce qui peut avoir des conséquences négatives.
Qu’est-ce que vous aimeriez transmettre aux générations futures ?
Je n’ai que 29 ans mais j’espère juste que les évolutions qu’on est en train de vivre vont continuer, cette recherche de naturalité, la prise de conscience sur les enjeux climatiques et sur la qualité de l’alimentation… je pense que ce sera le cas, j’en suis convaincu et je ne vois pas comment il peut en être autrement. En fait, je suis assez confiant concernant les générations futures.
C’est tout simple ! 3 mots pour décrire votre marque ?
Qualité, terroir et plaisir.
C’est quoi votre produit chouchou ?
La mangue sauvage du Cameroun, c’est un produit exclusif, on est les seuls à le faire, c’est une mangue très différente des autres mangues séchées. Elle est peu acide et très parfumée. En ce moment, on a aussi un faible avec mes enfants pour le Mix superfruits rouges, c’est hyper gourmand.
"Sinon, les fruits séchés peuvent être mis à tremper dans de l’eau de source, s’ils sont de qualité on retrouve quasiment des morceaux de fruits frais et on peut réaliser des smoothies ou faire des pâtisseries."
Un petit tip pour utiliser vos produits ?
Même si les fruits secs se conservent facilement et ne sont pas très périssables, il ne faut pas oublier que pour des fruits secs de qualité il faut les conserver au sec dans un récipient hermétique.
Sinon, les fruits séchés peuvent être mis à tremper dans de l’eau de source, s’ils sont de qualité on retrouve quasiment des morceaux de fruits frais et on peut réaliser des smoothies ou faire des pâtisseries. J’en ai déjà fait avec de la mangue ou de l’ananas. Il ne faut pas dépasser une nuit, quelques heures suffisent. On peut aussi juste les humidifier avec un brumisateur d’eau de source. Ne jetez pas l’eau de trempage car elle contient plein de saveurs et de sucre !
Vous pouvez aussi faire des rhums arrangés :)